tout ce qui est réel est fabulatoire, tout ce qui est fabulatoire est réel, mais il faut savoir choisir ses fabulations et éviter les hallucinations.

mardi, juillet 26, 2011

le simulacre implique le réalisme


Il n'est pas possible de réduire la réalité à des simulacres qui dévorent tout. L'idée du simulacre, dont Jean Baudrillard a fait un nihilisme radical,implique la référence à un réalisme, au moins hypothétique.
Lorsque le monde vient à la conscience du nouveau-né, celui-ci apprend à faire la différence entre le réel et l'absence ou l'illusion. Pourquoi l'adulte prétendrait-il renoncer aux vertus et à la résistance du réel. La phénoménologie et les sciences, aussi bien physiques que cognitives, nous apprennent le relativisme et le jugement que nous nécessitons pour vivre. Mais ne jetons pas le bébé avec l'eau du bain.
L'intelligence brillante de Baudrillard ne doit pas nous entraîner dans cette dérive. Il y a une position d'équilibre pratique à adopter. L'expérience du réel que nous construisons commence avec la naissance et se termine avec la mort. Nous demeurons toute notre vie des nouveaux-nés. Le monde vient à nous jusqu'au jour où nous le... quittons.

lundi, juillet 25, 2011

dimanche, juillet 24, 2011

Le bonheur de vivre


Le voyeur est celui qui jouit de voir. Il ressent le plaisir de l'oeil. Il voit le monde dans lequel il vit, il s'étonne de la beauté des formes et des couleurs. Il jouit du désir physique.
La voyelle est dans le jeu des lèvres, de la langue, dans l'ondulation musculaire qui fait vibrer les cordes vocales. La voyelle surgit dans le bonheur de parler, d'exprimer le plaisir voluptueux de voir.
Nous ne sommes pas sur terre au paradis. Mais nous imaginons le paradis en sélectionnant des morceaux de la Terre. Comment pourrions nous d'ailleurs l'imaginer autrement?
Quand tout va mal, quand la Terre se dresse devant nous comme un enfer, il suffit parfois de bouger, de voir d'autres images de la Terre pour retrouver la force de vivre.
Il y a en nous un instinct puissant de vie, une aptitude fondamentale au bonheur. Certes, les malheurs peuvent s'accumuler, qui nous plongent dans les ténèbres. Mais sachant, si nous en venons à la désirer, que la mort viendra de toute façon, et avec elle la paix à laquelle nous aspirons dans le malheur, pourquoi ne pas chercher en attendant le dérivatif de notre peine. Il est toujours dans la nature à laquelle nous appartenons corps et âme et qui remet la pierre dans la pierre, l'eau dans l'eau, l'arbre sur ses racines, la fleur au sommet de la tige.
C'est dans la nature que nous ressourçons la vie. Et cela signifie beaucoup. Il faut remettre dans le courant de l'eau le poisson qui en a été arraché pour qu'il reparte vivement. La nature, aussi longtemps que nous ne la détruisons pas, que nous ne la renions pas, que nous la célébrons avec nos yeux, nos voyelles, nos désirs, est une puissante merveille. Elle est notre mère. Les hommes l'ont compris depuis toujours. Ils l'ont oublié souvent. Orphelins, ils ont souffert. Mais ils peuvent toujours y revenir et y retrouver leurs désirs, leurs joies leurs bonheurs et leurs peurs d'enfant. Ils peuvent s'y régénérer, s'y reconstruire. Ils peuvent y renaître.

samedi, juillet 23, 2011

Mythanalyse du soleil


Le soleil n'est qu'un astre - une étoile - parmi des milliards d'autres. Avouons que ce seul fait scientifique donne à réfléchir d'une toute autre façon que celle des Incas et de tant d'autres sociétés anciennes dont les mythologies en ont fait leur dieu suprême.
On se demandera aussi pourquoi toutes les mythologies n'en ont pas fait de même leur Dieu principal. Cela dit, comme tout dieu central d'une cosmogonie, le soleil prend figure paternelle. Dès lors, nous nous retrouvons en terrain familier, dans le carré parental.
Si nous abordons le mythe solaire de la lumière, nous abordons un autre domaine d'analyse.
L'esprit, la lumière, la lucidité, par opposition à l'ombre, à l'obscurantisme, à la peur: c'est là le thème de la sécurité physique et psychologique indispensable au nouveau-né, qui met en scène la relation de familiarité et de confiance qui lie l'enfant à la mère et au père. Ce sont eux qui savent, qui sécurisent et qui éduquent. La lumière, la connaissance et la sécurité mentale sont les attributs des parents. La mythanalyse de la vérité ou de la lumière nous conduit encore au carré parental.
Oui, une mythanalyse du soleil est donc possible; Même si le soleil n'est plus un dieu ni un mythe pour nous, il en reste quelque chose dans notre sédimentation imaginaire. Le soleil garde une valeur de symbole social. Et la mythanalyse du soleil se décline selon la diversité des paramètres sociologiques et historiques du carré parental. Un beau thème d'analyse.

vendredi, juillet 22, 2011

La mythanalyse est-elle possible?


Une définition des mythes actuels est-elle crédible? Significative? Leur analyse est-elle possible? Crédible? Selon quelle postulats? Quelle méthodologie? Peut-on évaluer que certains mythes sont bons ou mauvais pour l'humanité?
Comment peut-on comprendre leur gestation? Leurs transformations, leurs disparitions?
Comment sont-ils liés? Ou pas liée, autonomes les uns des autres?
Comment sont-ils structurés?
Les mythes sont-ils de simples erreurs courantes de jugement? Ou ont-ils une signification sociale déterminante?
Voilà toute une série de questions, des plus légitimes. Et je pourrai augmenter cette liste.

Et ma réponse est sans ambiguïté. Je crois avoir répondu à toutes ces questions de façon claire et précise, y compris en ce qui concerne les limites de notre capacité d'élucidation.
La mythanalyse est aujourd'hui peu considérée, incomprise ou détournées vers des conceptions questionnables. Par exemple, les jungiens ont inventé un Olympe d'archétypes pour expliquer nos mythes. Ce n'est pas une explication plus acceptable que celle d'un dieu ou d'esprits mystérieux pour expliquer nos comportements sociaux ou individuels. Les archétypes n'expliquent rien. Ils sont eux-mêmes des figures imaginaires hypostasiées comme principes excplicatifs!
Quant à moi, je ne doute donc pas de l'avenir de la mythanalyse. J'ai souvent souligné que la mythanalyse, comme toute théorie, est une fiction. Mais il est des fictions plus lucides, plus éclairantes que d'autres. Plus explicatrices et plus instrumentales que d'autres. Par exemple, Dieu est une fiction qui nous fait errer au lieu de nous éclairer. La démocratie, un autre mythe, est une fiction qui nous sert mieux que les dictatures de l'armée, de l'Eglise ou de l'argent. Il faut savoir relativiser ces considérations.
Il y a beaucoup de travail à faire dans ce domaine des plus importants. Je n'ai fait que construire les fondements. Je les crois solides. Je ne sais pas de combien d'années je disposerai encore pour continuer tranquillement cette analyse. Peu importe. D'autres poursuivront. Car avec le temps, l'importance de la mythanalyse sera de moins en moins mise en doute. Les imaginaires sociaux jouent un rôle majeur dans toutes les populations, dans toutes les cultures, à toutes les époques. On se rendra de plus en plus compte de l'importance de les repérer, de les déchiffrer et de les transformer au service des valeurs hyperhumanistes auxquelles nous aspirons.

mercredi, juillet 20, 2011

mythanalyse, philosophie et technologies numériques


Le numérique est une technologie qui requestionne la philosophie occidentale et met en scène les mythes les plus actuels.

mardi, juillet 19, 2011

Pharmacie Fischer, Perpignan


Performance échange de la Pharmacie à la Librairie Torcatis, à Perpignan en 1976

lundi, juillet 18, 2011

Qui suis-je?


Autoportrait. Vu par l'Autre. Peinture acrylique sur toile, 2000.

dimanche, juillet 17, 2011

Mythanalyse du féminisme


L'imaginaire du féminisme: voilà un sujet de réflexion difficile et dans lequel il peut paraître pour un homme fort risqué de s'aventurer. Le mythanalyste dès lors prendra la précaution de rappeler qu'il ne donne qu'un avis d'homme et demandera, pour faire avancer l'analyse, aux femmes de le lire et de le critiquer.

Nous avons déjà souligné à maintes reprises que la Révolution de 1789 marque le moment où les fils se révoltent contre le père. Ils le guillotinent, coupent aussi les têtes des statues dans les églises, profanent les tombes des prêtres, s'emparent des biens de l'Eglise qui légitimait son pouvoir. Ils instaurent le temps des fils. Non plus le respect du passé, mais l'Histoire à accomplir et le Progrès. Ils remplacent la vérité révélée par le culte de la raison. Bref, ils prennent la place du père et veulent changer la société, ses institutions et ses valeurs, pour établir les leurs. Nous sommes depuis 1789 dans le temps des fils, même si nous observons que ceux-ci ont souvent repris des postures paternalistes et autoritaires, et reproduisent les valeurs qu'ils avaient reniées, comme la bourgeoisie napoléonienne a instauré le néo-classicisme après avoir découvert le préromantisme du XVIIIe siècle.
Bien sûr, les femmes ont participé dans les Salons et dans les rues à cette révolution. Elles aussi ont pris le Bastille. Elles-mêmes avaient été reléguées jusqu'alors à des rôles sociaux conformistes, restrictifs. Elles étaient absentes de l'histoire de la philosophie, des arts et des sciences, à quelques rares exceptions près. Il suffit d'ouvrir le dictionnaire pour le constater avec consternation. Mme du Châtelet, l'amie de Voltaire, Mme de Staël et quelques autres se sont distinguées, mais dans l'ensemble, la condition féminine instituée par le machisme social était rétrograde. Et les femmes n'ont pas obtenu de la révolution française un nouveau rôle, une reconnaissance, ni un nouveau pouvoir. Le code civil napoléonien ne leur accorde pas grand-chose, Napoléon lui-même étant convaincu qu'elles ne doivent pas se mêler des affaires publiques. Il faudra d'ailleurs attendre un siècle et demi pour qu'elles se voient reconnaître le simple droit de vote (par de Gaulle en France).
C'est contre ce blocage idéologique et social que les femmes vont finir par se révolter à leur tour, et élaborer le programme féministe.
Lorsque j'ai émigré au Québec, au début des années 1980, on finissait de discréditer le marxisme en France, mais c'était là encore le coeur du débat idéologique (Raymond Aron contre Sartre). Au Québec, le débat social portait sur le féminisme. Les femmes écrivaines, poètes, comme en France, Simone de Beauvoir ou Françoise Giroud, en étaient les principales actrices: Nicole Brossard, Suzanne Lamy, France Théoret et tant d'autres inspirées par Marie-Gérin-Lajoie ou Thérèse Casgrain. Et elles y mettaient une ardeur qui n'a jamais existé en France. Les suffragettes et les écrivaines ont été radicales, voulant instaurer un conflit libérateur avec les hommes; elles se déclaraient lesbiennes. Elles rejetaient bien sûr les valeurs maternelles, domestiques, aussi bien que celles d'objet sexuel dans lesquelles les hommes les avaient enfermées. Elles avaient fait leur révolte contre les mères dans la vie familiale et quotidienne, mais ce n'est plus contre la mère que les filles voulaient établir à leur tour le temps des filles. C'était contre les fils qui avaient maintenu vis-à-vis d'elles les postures réactionnaires du père. Et elles ne voulaient plus reproduire avec ces fils le modèle traditionnel, nourricier du couple familial dominé par l'homme et les exigences maternelles. Cet égalitarisme féministe revendiqué rappelait dans les années 1970-1980 l'égalitarisme citoyen réclamé par les révolutionnaires de 1789. La révolution féministe exigeait avec un siècle et demi de retard son dû de 1789, dont les fils, une fois au pouvoir, les avaient privées.
Au-delà des excès inévitables de toute révolution, même de celles qui sont idéologiques seulement et ne font pas couler le sang, ce que nous retiendrons aujourd'hui, c'est que les femmes ont dû alors inventer ce que nous appellerons les valeurs féminines, dans leur différence avec les valeurs masculines. Elles n'en avaient aucun modèle. Elles ne voulaient surtout pas répéter les valeurs de leurs mères, alors que les fils avaient, après la transgression, largement repris les valeurs confortables du père. Elles devaient repenser la société, non seulement au niveau des institutions politiques, mais, ce qui est beaucoup plus difficile, dans la vie quotidienne, privée, intersubjective, celle du couple, de la famille, de la maison. Et les hommes le ressentaient comme une agression directe contre leur machisme traditionnel (naturel, inconscient, et d'autant plus fort et résistant).
Le temps des filles, qui émerge un siècle et demi plus tard que le temps des fils, c'est donc celui de l'innovation sociale. Les fils se sont rangées, ont oublié leurs audaces. Pas les filles, qui veulent désormais changer les règles du jeu.
Et c'est un paradoxe historique pour nous, les hommes, que de voir ces femmes, que nous avions toujours pensées plus traditionalistes que nous, fonder les nouvelles valeurs féminines qui changent aujourd'hui les sociétés, aussi bien en Afrique, en Inde, en Chine qu'en Europe. Les femmes sont devenues les acteurs les plus innovants, créatifs de nos modes de socialisation. Il faut leur donner l'espace qu'elles revendiquent légitimement aussi en politique, dans l'économie, dans la gestion des entreprises, dans les institutions internationales, dans les sciences, dans les arts. Globalement, dans la foulée des changements sociaux qu'elles provoquent, elles peuvent aujourd'hui changer plus le monde que les hommes. En tout cas, il faut leur en donner la chance. Le monde va mal et ce sont les hommes qui l'ont mené là. Avec les femmes, ce ne sera peut-être pas mieux demain matin, tant les verrous sont bloqués, mais du moins un juste équilibre des responsabilités entre fils et filles est absolument nécessaire. Nous en sommes encore très loin de cette équité et de cette intelligence.

samedi, juillet 16, 2011

Eros et Prométhée


En instituant la figure de Thanatos en psychanalyse, Freud était assurément influencé par les désastres de la Seconde guerre mondiale.
Aujourd'hui, c'est sans doute par la puissance émergente du numérique qu'il aurait été frappé, comme moi.
Lorsque j'ai publié mon CyberProméthée (vlb, 2003), j'ai ajouté Prométhée aux instincts freudiens, proposant un attelage à trois têtes. J'ai changé d'avis depuis. Je situe plutôt Thanatos comme l'une des deux faces de Prométhée. Autrement dit, je modifierai le couple freudien des deux instincts fondamentaux Éros et Thanatos pour affirmer plutôt l'importance d'Eros et Prométhée, les deux dragons de la psyché. Thanatos est le pôle destructeur de l'instinct de puissance Prométhée, tandis que la fabrication en est le pôle créateur. Nous savons que l'artiste détruit pour construire.
Freud avait ramené la création et notamment l'art à une sublimation de la libido, une sorte de déclinaison énergétique éventuellement pathologique. C'était l'attitude d'un grand pessimiste. Il faut redonner au travail, à la production, à l'art toute sa légitimité positive, transformatrice, porteuse de progrès humain.

mercredi, juillet 13, 2011

Le monde actuel est aussi mythique que celui des Égyptiens, des Grecs ou des Wikings des


Repérer, déchiffrer les mythes actuels de nos sociétés, c'est ce que tente la mythanalyse. Elle postule qu'ils sont aussi nombreux, puissants que ceux des anciens. Certains se sont métamorphosés ou sont disparus, d'autres sont apparus, les noms ont changé, les constellations et les récits aussi. Mais nous y sommes plus aveugles que les anciens Grecs, Incas, Egyptiens ou Germains, qui, savaient les désigner. Bien sûr, nous nommons Dieu, Le Progrès, la Société, la Raison, l'Histoire, le Hasard et la Nécessité, mais il y en a beaucoup d'autres auxquels nous sommes aveugles, mais dont nous dépendons dans notre imagination et qu'il faut donc repérer.

mardi, juillet 12, 2011

Toute théorie est une fiction


Voilà l'un des postulats fondateurs de la mythanalyse, une théorie des imaginaires sociaux actuels, qui n'échappe certainement pas à ce postulat, pas plus que les théories astrophysiques, quantiques, mathématiques,biologiques, économiques, politiques,ETC.
Le rationalisme lui-même est une fiction. Pas la moindre. Dont l'excès a inspiré le positivisme. Le nihilisme aussi est une fiction.

lundi, juillet 11, 2011

L'illusion de la clarté


Toute clarté n'éclaire que ce que nous savons, désirons, voire ce que nous craignons - encore que cela relève davantage de l'obscurité. Les oiseaux nocturnes voient dans la nuit. beaucoup d'êtres vivants n'ont pas d'yeux. La clarté n'est que la rencontre du soleil et des yeux. Beaucoup? Pas grand-chose. Un champ spectral très limité. La clarté est plutôt une vertu de la familiarité que de la vision. De l'habitude que de l'esprit. Une fiction. Et pourtant, la clarté est tout pour nous. La nuit est la peur, l'imaginaire hyperactif. La clarté est réductrice, apaisante. Le lait du sein.

Signalisation imaginaire dans un champ de Winnekendonk, en Allemagne, en 1982.

dimanche, juillet 10, 2011

L'accélération du temps social


Pourquoi avons-nous développé une telle obsession de l'accélération du temps, alors que pendant des millénaires l'humanité a vécu selon un temps cyclique saisonnier, vertical, ahistorique, un temps lent sans flèche du temps, ce que nous appellerions un "temps ralenti". Il s'agissait même, pour plusieurs cultures d'un temps orienté vers le passé, vers l'origine, peut-être même d'un temps qui se dégradait de génération en génération. N'est-ce pas ce que symbolise la perte du Paradis terrestre?
Comme je l'ai expliqué dans l'analyse critique de l'idéologie avant-gardiste (L'Histoire de l'art est terminée,Balland, Paris, 1981), cela tient à l'inversion du temps qu'a provoquée la Révolution de 1789.
Alors que le temps était légitimé par la création divine, que l'humanité occidentale fondait le sens des choses sur cette origine, que l'art imitait le passé, la vertu l'exemple du Christ, en guillotinant le roi, le père, les fils ont instauré le Progrès à venir pour remplacer le Bien divin originel, L'Histoire à venir et son achèvement pour remplacer l'explication des origines bibliques. Bref, les hommes ont créé le temps des fils, qui mettait fin au temps du Père. Ils ont inversé le Temps. Ce Temps de l'Homme est une révolution mythique fondamentale qui instaure la modernité.
Et il est alors logique que cette fixation sur l'horizon du futur, dont l'accomplissement dépend désormais de l'Homme, crée un désir d'y parvenir rapidement, de s'en rapprocher avec la même exaltation qu'inspirait auparavant le désir de Dieu. Nous avons hâte que le Progrès arrive, du moins en Occident, mais aussi maintenant en Chine, en Inde, au Brésil. Nous avons institué une idéologie de l'innovation, accéléré en conséquence la recherche technoscientifique, créé les Prix Nobel pour statufier les plus grands chercheurs. Nous fondons le progrès économique, social et même l'équilibre de notre course folle sur l'innovation permanente. La loi de Moore affirmant le doublement tous les 18 mois du progrès des technologies numériques, s'est imposée, au point de servir de fondement aux utopies barbares du trans- et du posthumanisme. Le temps se cannibalise.
Nous avons vu que l'avant-garde dans le champ de la création artistique a rencontré l'aboutissement de sa propre logique mortifère. Admettons que cela ne se répétera pas dans le cas de notre idéologie sociale et scientifique qui sont fondées sur le progrès, contrairement au champ de l'art. Mais ne nous laissons pas emporter par le mouvement sans pratiquer l'arrêt sur image, nécessaire pour garder le temps de la réflexion critique et de la jouissance vitale. Nous avons remplacé la domination de l'idée d'espace par celle du temps. Il y a un abus du temps dans notre façon d'envisager la vie.
Je ne veux pas dire pour autant qu'il n'y ait pas urgence de résorber la violence sociale, l'injustice, la misère humaine. Décidément, il est difficile aujourd'hui de ralentir notre temps social. Les fils sont impatients. Nous avons adopté la vitesse comme un mode d'existence et de pensée.

Intervention de signalisation imaginaire urbaine en 1982, dans le cadre de la Biennale de Sao Paolo.

samedi, juillet 09, 2011

Angoulême


Angoulême, la ville de province, périphérique de la métropole parisienne, une fille de la famille. Géographie politique anthropomorphique, pensée sur le modèle de la structure familiale. Nous pensons beaucoup plus sur ce modèle que nous n'en avons conscience, beaucoup plus selon la hiérarcie familiale que selon la géométrie.

jeudi, juillet 07, 2011

art sociologique à Angoulême (1)


"Paris - père", "Angoulême - fille". Le centralisme parisien et le régionalisme français. Nous pensons les relations entre centre et périphérie, capitale et régions selon le modèle anthropomorphique des relations familiales, la matrice de nos structures mentales.

Intervention urbaine, signalétique imaginaire, 1980.

mercredi, juillet 06, 2011

Rêves et cauchemars


Nos contes et légendes populaires sont des merveilles de récits mythiques. L'imaginaire y déborde, évoquant les inconscients sociaux, selon la diversité sociale et historique de ces cultures.
Chacun de nous fait aussi l'expérience chaque nuit de débordements oniriques agréables ou cauchemardesques. Malgré le désordre des liens entre les séquences de nos rêves, la volatilité des images, les répétitions obsessionnelles qui réactivent des traumatismes ou simplement des évènements marquants de nos vies, il semble que nous observions dans les rêves une polarisation entre le désir et l'anxiété, entre Éros et Thanatos. Le loup se fait mouton, l'agneau devient menaçant, sans que nous soyons capables d'analyser ces mutations binaires. Il apparaît que notre imaginaire individuel, comme les imaginaires sociaux, se structure principalement selon cette bipolarité du plaisir et de l'anxiété. La Bible elle-même met en scène dramatiquement cette structure en se bâtissant sur l'opposition entre le Bien et le Mal. La religion en a fait son fondement et cette structure se retrouve dans toutes les mythologies, toutes les légendes, tous les contes. Sans doute les figures de la mythologies ne sont-elles pas simplistes. Par exemple, celles de la mythologie grecque, sont souvent ambiguës, tantôt vertueuses, tantôt jouisseuses, tantôt méchantes, tantôt victimes, bref plus proches de notre humanité. Mais il demeure que nous les caractérisons selon le bien et le mal, le bonheur et la souffrance. Demeurent la punition, la cruauté, la jouissance et la douleur, comme deux pôles marquants de la vie des dieux et demi-dieux et autres formes de nos inventions.
Cette bipolarité peut trouver son origine biologique dans le carré parental, dans l'alternance de la faim qui fait crier l'estomac et de la satisfaction du nouveau-né apaisé par le sein. Il n'est pas nécessaire de faire des hypothèses métaphysiques, manichéennes, d'inventer un Dieu et un Diable, pour traduire cette expérience fondatrice du désirable et du redoutable que fait chaque nouveau-né. Demeurons matérialistes, dans le biologique, le physiologique, lorsque nous cherchons les sources et les structures anthropologiques de notre imaginaire. Cela semble plus modeste et plus sûr que les tentatives structuralistes, qui dérivent dans la littérature, l'érudition et l'idéalisme.

mardi, juillet 05, 2011

Kant, un philosophe sans sensibilité


Qu'est-ce que le temps qui dure? Le temps qui n'est pas volatile, pas éphémère, mais qui a une intensité. Un temps court? Long? Répétitif? Monotone? Intense?
Nous avons du temps toutes sortes d'impressions différentes et contradictoires. Bergson en a abondamment parlé.
Je vois surtout dans la durée une stabilité. Celle d'un effort persévérant, celle d'un développement durable, comme on le dit souvent aujourd'hui pour faire référence à l'aménagement écologique. Nous avons, bien sûr un - des problèmes - avec le temps. Une oeuvre, un couple peuvent bénéficier de la durée. La durée n'est pas l'éternité. Il y a des durées longues et d'autres courtes. Etre de courte durée paraît négatif, encore que si nous parlons d'un mal, cela devientne positif. Nous mettons donc dans le temps des valeurs, des qualités ou des défauts, comme dans l'espace.
L'idée kantienne de l'espace et du temps comme des formes a priori de la sensibilité est une pauvre abstraction théorique, bien digne d'un philosophe qui a une vie ordinaire et répétitive. Un philosophe qui n'a justement pas de sensibilité!
La sensibilité fait étroitement partie de l'intelligence, parce que l'intelligence s'est formée dans le climat affectif du carré parental, où tout lien implique une émotion, une valeur rassurante ou inquiétante. La construction neuronale du cerveau est fondée sur l'affectif.
Si Kant avait su conserver cette sensibilité affective, il aurait évité de perdre des années è réfléchir et écrire sur les formes a priori de la sensibilité, avec lesquelles j'ai perdu à mon tour trop de temps lorsque j'étais étudiant en philosophie.
L'abstraction est une démarche fort utile, instrumentalement très efficace, qui nous a valu beaucoup de réussites scientifiques. Elle est le fondement du mythe platonicien des eidos, les idées abstraites. Nous lui devons le rationalisme. Ce n'est pas rien! Mais la réalité qui nous intéresse est dans la caverne de Platon, pas dans l'air éthéré et vide de l'idéalisme.
Cela aussi, la mythanalyse nous le rappelle avec force. La lucidité est du domaine de l'affect. La vérité est une construction théorique, qui quitte ses fondations vitales et devient vite fictive. Même de la mythanalyse, inévitablement théorisante, j'ai pris soin de dire qu'elle est une théorie-fiction.

Le champ signalétique de Winnekendonk, Allemagne, 1982

lundi, juillet 04, 2011

Lust - le désir


Cette signalisation imaginaire choisie et placée par les habitants du petit village allemand de Winnekendonk dans un champ en 1982 se reflète dans l'eau au bord du bois.
Envie, désir, libido, Éros: un thème intime que la nature anime de vibrations narcissiques.
Freud a génialement mis en évidence ce fondement érotique de nos vies dans sa théorie psychanalytique. La psychanalyse en a fait abusivement une obsession. On pourra écrire tout ce que l'on voudra contre Freud et contre la psychanalyse, souvent à juste titre - et je ne m'en suis pas privé moi-même en théorisant la mythanalyse (La société sur le divan, 2008), il n'en demeure pas moins que nous devons à Freud cette mise en évidence dont la puissance demeure incontournable.
Éros est à coup sûr présent dans le carré parental, sous forme nourricière, même si l'éveil à la sexualité est retardé physiologiquement chez l'enfant pendant plusieurs années. (Retardé ne veut pas dire absent. Mais l'explosion sexuelle déclenchée par les hormones à l'âge de la puberté devient alors effectivement obsessionnelle chez beaucoup de personnes.)

dimanche, juillet 03, 2011

le sommeil


Vie diurne et vie nocturne, veille et sommeil, vie pratique et rêve ou cauchemar: nous avons une vie à deux temps, deux facettes, que nous imposent les configurations de l'univers et de nos corps, mais qui fonde aussi la structure de notre imaginaire. Ayant déjà évoqué précédemment ici la physiologie du rêve,je n'y reviendrai pas. Mais il faut admettre que l'ombre et la lumière sont pour nous deux sphères symboliques très élaborées, dans toutes les cultures humaines, qui ont largement contribué à déterminer nos religions, nos inconscients collectifs et individuels, nos mythes, et qui les modèlent encore aujourd'hui.
Conséquemment, le sommeil apparaît certes comme un temps de repos du corps, exception faite du cerveau. L'interprétation des rêves semble avoir toujours été un domaine privilégié de connaissance, jadis des devins et autres pythies, aujourd'hui des psychanalystes. L'oeil de la nuit, l'oeil de l'oreiller, voit, évoque, prescient le passé, le présent et le futur de nos vies. Nous prêtons au sommeil des vertus de communication avec les esprits et l'au-delà. Certes, Freud, le mystificateur mystifié, a ramené cette science occulte à l'expression inconsciente mais très matérialiste de nos instincts Éros et Thanatos, et au défoulement répétitif de nos traumatismes infantiles. Il demeure que pour lui le sommeil et l'hypnose, deux états qui nous dépossèdent du contrôle rationnel par le Surmoi de nos mouvements et de notre auto-contrôle, permettent de mettre à nu notre inconscient. Le sommeil impose la nudité du corps et de l'inconscient. Une nudité individuelle qui revêt les voiles de nos mythes collectifs et de leurs échos individuels.

vendredi, juillet 01, 2011

Mythanalyse et mythologie


L'un des postulats fondamentaux de la mythanalyse est de reconnaître la présence incontournable des mythes dans nos sociétés contemporaines. Alors que nous nous étonnons de la naïveté des Égyptiens, des Grecs ou des Incas, qui croyaient à des dieux que nous jugeons totalement imaginaires, et que nous nous pensons modernes, la réalité est que nous mythifions nous-mêmes aujourd'hui tout autant des figures imaginaires qui sont tout aussi ingénues. La mythanalyse explore les mythes actuels, tandis que la mythologie déploie des trésors d'érudition historique sur des mythes anciens. Il n'est pas question ici de dévaloriser la mythologie, extrêmement intéressante et significative de notre passé, et qui peut nous éclairer sur notre présent, mais de marquer la différence avec l'actualité de la mythanalyse. C'est en ce sens que nous nous sommes, dès les années 1970, orientés différemment des historiens importants de la mythologie, tels que Gilbert Durand, Henri Corbin, Mircea Eliade, etc.
Certes, les mythes naissent, meurent, se transforment, et beaucoup de nos mythes actuels ont de nouvelles apparences, que nous appellerons modernes, postmodernes, posthumanistes, etc. Mais nous demeurons aveugles à la naïveté de nos monothéismes actuels, de nos croyance dans la Raison, l'Economie, le Progrès, la Technoscience, le numérique, etc. Il n'en demeure pas moins important de distinguer nous aussi aujourd'hui entre les bons et les mauvais mythes et dans leur ambivalence entre leurs bonnes et leurs mauvaises facettes.